L’ océan Indien, nous raconte une pléthore d’histoires singulières et passionnantes mêlant conquêtes militaires, traversées tumultueuses et découvertes fantastiques, qui façonnent la construction de ses routes maritimes stratégiques, afin de servir l’approvisionnement des riches empires de Méditerranée occidentale, en produits de luxe très convoités : pierres précieuses or et épices.
Quand au printemps -327, Alexandre le Grand, roi de Macédoine, part avec son armée épuisée après un long périple, pour la campagne du Penjab (ex Royaume indien, Pakistan actuel), affronter les troupes montées sur éléphants du roi Poros, dans la plaine de l’Indus, il ne se doute pas (sous la forte pression de ses hommes effrayés par la supériorité numérique indienne; mutinerie), que cette opération très risquée, marquera la fin soudaine de son éreintante conquête de l’Est.
Après avoir soumis non sans mal, toute la grande vallée accidentée et bien défendue du royaume des Paurava, Alexandre le Grand fait construire rapidement une flotte importante, financée par le roi indien déchu. Placée sous le commandement de son lieutenant Néarque, elle est en charge de leur retour périlleux en Macédoine, depuis l’Indus vers la mer des Indes (nouvelle limite officielle du monde pour les grecs); cap sur le golfe Persique puis Babylone.
La percée dans l’océan Indien d’Alexandre le Grand, donne une nouvelle vision maritime aux grecs et ouvre des opportunités économiques considérables : à 20 jours de navigation lente des côtes indiennes (comme décrit par les égyptiens), se trouve l’île de Taprobane (Ceylan, actuel Sri Lanka) et sa centaine d’îlots. Une terre paradisiaque peuplée d’hommes organisés autour de 10 cités et d’animaux sauvages, où poussent des épices fabuleuses. Là, l’océan regorge en grande quantité, de perles d’une taille et pureté exceptionnelles.
Progressivement, se dessinent de nombreuses routes commerciales parcourues par des convois très attendus, chargés de produits exotiques, découverts dans les contrées lointaines, jouxtant l’océan. Rapidement expédiés vers la zone centrale du monde : la mer Méditerranée, autour de laquelle sont très tôt représentés, les côtes et ports des principaux continents (Asie, Europe, Afrique), ils sont négociés à prix d’or.
A partir du 8ème siècle, l’expérience aguerrie des navigateurs-marchands arabes (précision du terrain cartographié, maîtrise du sens des vents sur des boutres furtives, inventions d’outils d’aide à la navigation), permet une meilleure compréhension de ce vaste domaine maritime mystérieux, dont on craint les remous tout en repoussant sans cesse les limites.
Un océan sous domination musulmane, qui se politise et militarise au Moyen-Âge, particulièrement au début des croisades, devant le succès et l’hégémonie des négociants de la péninsule arabique, dont le grand privilège est d’être reliée à ses eaux, par 2 mers adjacentes: Rouge & golfe Persique.
Les cartes se précisent; elles permettent d’aller plus loin et de tisser des liens culturels profonds, entre les mondes arabo-musulman, Est-africain et asiatique, qui impressionnent l’Europe inquiète.
C’est à cette période que Sharif Al-Idrisî (1100-1165), originaire de Sebta au Maroc, géographe, formé à l’université de Cordoue, alors l’une des plus prestigieuses d’Europe, conçoit pour Roger II roi normand de Sicile, un globe terrestre en argent, accompagné d’un livre de commentaires, intitulé “Amusement pour qui désire découvrir le monde” ou “Livre de Roger”.
En recueillant tous les savoirs scientifiques grecs, arabes et chrétiens, il réalise la première représentation concrète du monde.
Ce commerce maritime de plus en plus dense, florissant et techniquement renforcé par l’appui vital d’îles relais, ainsi que par l’organisation financière de plateformes de gestion-distribution (Zanzibar, Kilwa), solidement protégées derrière des fortifications ingénieuses, donnera naissance à une civilisation unique : la culture Swahili qui réunit les « gens du rivage » dans les pays du « Zanj ».
Sur le long et prospère littoral d’ Afrique de l’Est ainsi que dans les îles périphériques, depuis la Somalie au Mozambique, en passant par les Comores, jusqu’à Madagascar, se mélangent avec richesse, les identités africaine et arabo-persane, à l’origine de la création de sultanats puissants, face au Bahar al Hindi (océan Indien).